Qu'il s'agisse de grandes ou de petites exploitations, on demandait aux terres arables de produire des céréales destinées exclusivement à l'alimentation humaine : dans les grandes plaines du Nord, c'était l'épeautre, le seigle, l'orge d'hiver, l'avoine, moins souvent le froment ; dans le Sud, on cultivait le froment, le mil, le sorgho.
La rotation des cultures et jachères.
En gros, on connaissait deux types de rotation des cultures. La rotation biennale a été seule pratiquée dans le Midi : à une année de culture succédait une année de jachère. Dans les terres à blé du Nord, la rotation triennale était, sinon de règle, du moins fréquente, et cela sans doute depuis longtemps : les champs portaient successivement du blé d'hiver, du blé de printemps et étaient ensuite laissés en jachère. En l'occurrence, les conditions climatiques prévalant dans les plaines du Nord étaient favorables à la rotation triennale : alors que l'orge et surtout l'avoine de printemps ne supportent pas les coups de chaleur du Midi méditerranéen, elles s'accommodent bien, en revanche, du climat plus frais et plus humide du Nord.
On avait partout recours à la jachère, que ce soit en pays de rotation biennale ou dans les zones de rotation triennale. On savait en effet qu'un repos plus ou moins long était nécessaire à la terre pour qu'elle puisse se reconstituer et porter à nouveau des récoltes. Dans les terres pauvres, il arrivait même que des champs restent en jachère pendant plusieurs années. Il y avait à tout cela une raison fondamentale qui était le manque d'engrais
Le fumier animal.
À l'exception de la marne, utilisée depuis des temps reculés dans les régions où il s'en trouvait, notamment en Artois, en Normandie et en Île-de-France, mais aussi dans le Maine et le Béarn, le seul engrais alors connu était le fumier animal. Mais les bovins, qui donnaient le meilleur fumier, étaient généralement peu nombreux. Comme on ne cultivait aucune plante fourragère, les animaux ne connaissaient que de brèves périodes de stabulation, pendant lesquelles on les nourrissait tant bien que mal avec l'herbe de rares prés de fauche : il n'en résultait que peu de fumier, que l'on épandait uniquement sur les champs qui allaient recevoir les semailles de blé d'hiver. On recourait aussi à la vaine pâture, qui consistait à faire paître les animaux sur les champs qui venaient d'être moissonnés, mais la période de vaine pâture était trop courte pour que les champs soient suffisamment fumés.
C'est pour tout cela que, pendant des siècles, bien au-delà du Moyen Âge, on a fait appel à la jachère. C'est aussi pour cette raison que les rendements sont restés longtemps très bas.
Les campagnes n'étaient pas pour autant vouées à l'immobilité. En fait, un prodigieux pas en avant a été fait entre le Xe et le XIIIe siècle, période pendant laquelle les hommes ont fait reculer les forêts, les landes, les marécages et même la mer : c'est l'époque dite "des grands défrichements".
Source BNF.